Titre : Ne suis-je pas une femme ?
Auteur : bell hooks
Édition : Cambourakis
Parution : Septembre 2015
Résumé de l'éditeur :
« Ne suis-je pas une femme ? », telle est la question que Sojourner
Truth, ancienne esclave, lança en 1851 lors d’un discours célèbre,
interpellant féministes et abolitionnistes sur les diverses oppressions
subies par les femmes noires : oppressions de classe, de race, de sexe. Héritière de ce geste, bell hooks décrit dans ce livre paru en 1981 aux
États-Unis les processus de marginalisation des femmes noires. Elle
livre une critique sans concession des féminismes blancs, des mouvements
noirs de libération, et de leur difficulté à prendre en compte les
oppressions croisées. Un livre majeur du « Black Feminism », un outil nécessaire pour
tou·te·s à l’heure où, en France, une nouvelle génération
d’Afroféministes prend la parole.
Mon avis :
Cela faisait un moment que je devais me pencher sur le sujet de l'afroféminisme. Trop longtemps ignoré par la recherche/littérature/société, j'admets moi-même avoir pris bien trop de temps à me renseigner sur le sujet alors qu'il est indispensable à la lutte féministe. Et j'insiste sur le mot indispensable, parce que le mouvement féministe ne peut avoir de sens que si toutes les femmes sont prises en compte, avec leurs histoires et revendications propres.
Pour commencer mon éducation, j'ai donc choisi bell hooks. Même si son œuvre est centrée sur le contexte étasunien, elle donne déjà une première idée des diverses oppressions subies par les femmes noires, qui ont mené par la suite au Black Feminism, mouvement né dans les années 60-70, plus ou moins à la même période que l'afroféminisme en Europe.
Mais comment
résumer en quelques phrases cet essai si important ? Cela n'est pas
possible, mais je vais essayer d'en ressortir les principales idées.
Dans cet essai, l'autrice remonte à l'origine de l’assujettissement des femmes noires aux États-Unis, à savoir l'esclavage, pour montrer comment l'oppression s'est installée, physiquement, mentalement. Elle explique comment les femmes noires ont été placées dès le départ en bas de l'échelle humaine, et comment on les a forcé à y rester tout au long de l'Histoire.
Le plus fou/terrible/contradictoire, c'est qu'on a infligé aux femmes noires les pires horreurs, tout en leur reprochant. On a forcé les femmes noires à assumer des rôles d'hommes en travaillant dans les champs, tout en continuant d'enfanter, de s'occuper des enfants et du foyer, sans
jamais se plaindre, sans jamais plier, pour à la fin leur reprocher d'émasculer les
hommes avec leur rôle de "matriarche" (qui n'en était pas vraiment un d'ailleurs, voir chapitre 2). On a réduit leur féminité au maximum, les utilisant comme objet sexuel, pour plus tard leur
reprocher de ne pas être aussi jolie que les blanches,
aussi pure, aussi douce.
Et cette violence, cette oppression, vient d'abord des hommes blancs, mais elle a été perpétuée par les femmes blanches comme les hommes noirs. D'ailleurs, quand les premières revendications féministes ont éclaté, les femmes noires n'étaient jamais prises en compte. Quand les femmes blanches utilisaient le terme générique "femmes", c'était pour parler de la réalité des femmes blanches, pas des femmes noires. Et quand elle parlaient de "noirs", il était sous-entendus les hommes noirs.
Mais pourquoi les ignorer ? Pour garder un statut supérieur. Par vengeance contre les maris infidèles blancs (car il est toujours plus facile de se retourner contre les victimes que contre les agresseurs...). Par assimilation, parce que les hommes blancs étaient foncièrement sexistes et racistes, et que ce système a été perpétué sans réfléchir. Et tant d'autres raisons injustifiées...
De ce fait, les femmes noires ont vécu une double invisibilisation,
une double discrimination de sexe et de race, de toutes parts. C'est pourquoi elles ont commencé à se mobiliser ensemble pour créer le Black Feminism. Car une femme noire ne peut pas choisir entre combattre le sexisme ou le racisme, les deux sont intrinsèquement liés. Et la liberté des femmes ne sera jamais acquise sans l'abolition des deux.
Ne suis-je pas une femme ? est donc une très bonne
introduction à l'histoire des femmes noires étasunienne et à tous les
combats quelles ont dû mener, et doivent encore mener. Cependant, comme nous le rappelle Amandine Gay dans la préface, le contexte est différent en Europe, beaucoup plus empreint par le colonialisme. Je pense donc que ma
prochaine lecture sur le sujet se tournera sur le contexte français. Si vous avez des recommandations, n'hésitez pas à me les faire parvenir !
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